"Un dimanche à la campagne" de Bertrand Tavernier

"Un dimanche à la campagne" , présenté à Cannes 1984 est une adaptation d'un roman de Pierre Bost (également scénariste au cinéma) : "M. Ladmiral va bientôt mourir" par Bertrand Tavernier. Vers 1910, un dimanche de début d'automne non loin de Paris, un vieux peintre, M. Ladmiral (le comédien de théatre Louis Ducreux), reçoit comme régulièrement la famille de son fils Gonzague (Michel Aumont). Dans l'après-midi surgit sa fille Irène (Sabine Azéma). Le film traite d'abord du temps qui passe, M. Ladmiral a croisé Monet, Caillebotte, Van Gogh..On retrouve dans ce film les compositions des Impressionnistes dans les séquence extérieures à la maison familiale (le village, la guinguette). Pour illustrer son époque, le film utilise essentiellement l'académisme chatoyant des intérieurs sombres et des extérieurs de début d'automne. Le ton, le rythme, et la musique de Fauré participent à l'esthétique non seulement confortable et plaisante mais qui porte et véhicule cette période, ses goûts et ses idées de la Belle-Epoque, zone charnière de l'art et de l'Histoire récente. Le film propose également une sereine réflexion sur le temps et les moyens de l'arrêter : la peinture, la photographie, et en fin de compte, le cinéma) . Le film revisite également, et comme rarement, les souvenirs d'enfance : les siestes d'été derrière les persiennes fermées, les verres d'eau fraîche, l'odeur du bois, des feuilles et de l'herbe, les bruits de la campagne. On a parfois reproché à Tavernier un certain académisme, et c'est peut-être "un dimanche à la campagne" qui illustre le mieux ce propos, et semble indiquer que non seulement il l'assume mais que c'est pour lui un objet de recherche et de réflexion. Car cet académisme s'épanouit grâce à une finesse et une sensibilité remarquables, et est servi par une interprétation éblouissante et une mise en scène justement récompensée à Cannes. "Un dimanche à la campagne" semble ne pas laisser prise au temps, peut-être précisément grâce à son classicisme et à son sujet sur le temps qui passe. C'est un film juste. D'aprés un article de Vincent Fournols.